Transformation numérique du secteur médico-social

Innovation numérique

par Juggle

Tout savoir sur les tenants et aboutissants de la transformation numérique dans le secteur médico-social, pour les établissements, les professionnels et les publics bénéficiaires.

Des professionnels échangent et travaillent autour de dispositifs numériques

Dans le paysage en constante évolution du secteur médico-social, la transformation numérique apparaît comme un catalyseur essentiel, redéfinissant la manière dont nous abordons l'accompagnement des personnes en situation de handicap au sein des établissements et services médico-sociaux (ESMS). Cette révolution digitale va bien au-delà de la simple modernisation des outils ; elle incarne une métamorphose profonde de l'offre médico-sociale, façonnant de nouvelles perspectives et améliorant considérablement les pratiques d'accompagnement.

Dans cet article, nous explorerons les multiples facettes de cette transformation numérique. De la personnalisation à la digitalisation des parcours de vie, en passant par l'intégration de technologies émergentes, plongeons dans cet univers novateur où la technologie et le soin se conjuguent pour offrir une meilleure qualité de vie aux personnes accompagnées.

Transformation numérique et e-santé - définitions

La notion de transformation numérique tend à être de plus en plus employée dans la présentation des évolutions de notre société. Ce processus demeure toutefois encore méconnu, et parfois non mis en œuvre, dans de nombreux secteurs d’activité. Concernant le médico-social, il est devenu totalement incontournable, notamment du fait de l’essor de la e-santé vers la fin des années 2000 et la mise en place d’une politique forte d’investissement de la part de la France

Transformation numérique VS numérisation

Mais revenons d’abord sur les termes. La transformation numérique est donc un processus qui consiste à installer puis développer des pratiques numériques dans une organisation. Ce processus implique qu’il y ait une véritable évolution des pratiques, voire l’instauration de nouvelles pratiques, basées sur l’emploi des outils numériques. Il s’agit bien d’un changement profond, voire une transformation de l’organisation qui nécessite du temps et bien souvent un accompagnement extérieur. Il est nécessaire en outre de bien le dissocier de ce qu’il convient d’appeler la numérisation, c’est-à-dire la traduction des pratiques de l’organisation dans une version numérique (passer d’un recueil de données personnelles via un document à un formulaire en ligne par exemple) qui seule ne constitue pas une transformation numérique.

La e-santé

La e-santé est quant à elle définie par la commission européenne comme étant "l’application des technologies de l’information et de la communication à l’ensemble des activités en rapport avec la santé". Autrement dit, la e-santé à la fois incite à et se nourrit de la transformation numérique.

Enfin, il est important de rappeler que ce développement se fait dans un cadre juridique précis qui vise avant tout à protéger les usagers et à s’assurer que les pratiques en la matière sont respectueuses des droits des personnes.

Les enjeux du numérique dans le médico-social

Le secteur médico-social vit actuellement des mutations profondes générées notamment par le virage inclusif et la nécessité de favoriser le développement tant de l’autonomie que de l’autodétermination des personnes. Celles-ci ont été notamment formulées dans le cadre de la stratégie quinquennale d’évolution et de transformation de l’offre médico-sociale d’une part, et via le déploiement progressif de SERAFIN-PH d’autre part.

Les évolutions ainsi souhaitées nécessitent que soient déployés divers systèmes de traçage des actions menées et d’évaluation de ces dernières. Or il est très rapidement apparu qu’un tel développement appelle nécessairement l’ensemble des acteurs du secteur à devoir générer et utiliser un nombre croissant de données, à rationaliser et harmoniser leurs fonctionnements et les process qui les structurent, et enfin à doter les professionnels des outils qui vont leur permettre de relever les défis précédemment cités.

Dans ce contexte, la transformation numérique dans le médico-social apparait comme étant un levier désormais incontournable pour réussir ces évolutions, sous réserve toutefois que les professionnels concernés soient accompagnés et que tant les avantages et les limites de ces nouvelles pratiques soient clairement identifiées

Les avantages du numérique pour l’usager et sa famille

Du côté de l’usager et de sa famille, cette transformation est en premier lieu un vecteur important d’amélioration de leur participation dans l’élaboration et le suivi de leur parcours de soin/parcours de vie.

Immédiatement, on pense à l’accessibilité des données via internet et la personnalisation des parcours. En effet, la mise à disposition d’un volume de données à la fois plus précises et plus nombreuses, ainsi qu’une fréquence d’actualisation plus élevée de ces données est un atout majeur.

Elle permet non seulement aux usagers et à leur famille de pouvoir mieux suivre les actions qui leurs sont proposées, d’interagir plus régulièrement avec les intervenants, qui en retour vont pouvoir ajuster leur accompagnement en fonction de l’évolution de leurs besoins et de leurs demandes. Le numérique est donc un formidable moyen de permettre aux usagers d’être de plus en plus acteurs de leur projet.

Par ailleurs, elle leur permet d’accéder à des modalités d’accompagnement à distance (télémédecine, télésoin notamment) qui sont souvent d’une grande utilité en fonction de diverses contraintes d’organisation du temps ou de distance.

Les avantages du numérique pour les professionnels

Concernant les professionnels, la transformation numérique vient apporter un soutien spécifique à diverses activités et missions du quotidien.

Évidemment, l’amélioration de la communication interne, le partage d’information, et au-delà la coordination interprofessionnelle sont nettement impactés par ces évolutions. En effet, la gestion des dossiers peut être simplifiée et une prise de décision ou la réorganisation d’un projet personnalisé d’accompagnement peut intervenir plus rapidement.

De plus, l’accroissement des données relatives à chaque personne accompagnée que l’on peut plus aisément croiser avec des connaissances actualisées issues de la littérature scientifique vient naturellement participer à l’amélioration des pratiques.

Enfin, l’automatisation de certaines tâches, notamment administratives, constitue une facilitation du reporting et un gain de temps non négligeable.

Les avantages du numérique pour les établissements

Étant désormais dans l’obligation d’organiser un suivi et une évaluation précise de leur activité, les établissements du médico-social peuvent également trouver plusieurs avantages à effectuer cette transformation numérique.

Avant toute chose, la rationalisation et par voie de conséquence, l’optimisation des ressources matérielles et humaines peut être considérablement améliorée. Les différents dispositifs de gestion, d’organisation des locaux et/ou des temps de travail, l’accélération et l’harmonisation des reportings sont des facteurs qui peuvent faciliter le travail des professionnels, et par extension leur bien-être au travail. Cela constitue un levier non négligeable pour attirer et fidéliser les professionnels dans ce secteur qui connaît encore des problèmes de recrutement.

Parallèlement, cette logique de gestion optimisée est susceptible de générer des économies de coût de fonctionnement, notamment sur le plan administratif.

Enfin cela contribue globalement à améliorer une démarche qualité concernant les services et soin rendu à l’usager, ce qui reste le cœur de l’objectif des accompagnements que proposent ces établissements.

La digitalisation du parcours de soin et d’accompagnement

Depuis 2019, le Ministère de la santé et de la prévention a entamé une politique de digitalisation pour accompagner la transformation numérique du parcours de santé. Dénommée e-parcours, et notamment encadré par l’instruction du 24 mai 2019, cette démarche inscrite dans la stratégie de transformation du système de santé Ma santé 2022 s’appuie en particulier sur les différents outils mis en place au cours de la dernière décennie (DMP, mon espace santé, messagerie sécurisée, etc.).

Son objectif est de faciliter à la fois la coordination des acteurs et la fluidité des parcours des usagers, tout en assurant une protection des données rigoureuse et un accès facilité à leurs données de santé pour les usagers.

Les établissements médico-sociaux sont totalement concernés, et d’ores et déjà inclus dans cette politique, puisque la logique qui y prédomine est de prendre en considération l’ensemble du parcours de l’usager, et ce sur des temps longs. Cela signifie concrètement que les établissements doivent notamment renforcer leur coopération avec les autres acteurs (soin de santé courant – dentiste, ophtalmologiste…– pour un enfant accueilli en IME par exemple) et assurer que l’ensemble de l’accompagnement qui aura pu être proposé soit à la fois accessible pour les usagers, mais également pour les professionnels ou autres équipes qui pourront assurer la suite de l’accompagnement s’il s’avérait nécessaire au moment de la sortie dudit établissement.

L’intelligence artificielle et la médecine prédictive

L’une des particularités de l’intelligence artificielle (IA) est de pourvoir traiter un nombre très élevé de données, ce que l’on appelle communément les big data. Elle est d’ailleurs déjà implantée dans certains domaines de la médecine. Elle fait donc naturellement l’objet d’un effort de recherche conséquent en cela qu’elle permet d’améliorer considérablement nombre de démarches telles que le diagnostic, la chirurgie, la robotique impliquée en santé, la pharmacologie ou bien la prévention.

C’est notamment sur ce dernier point que les enjeux sont les plus importants. En effet, le recours à l’IA laisse envisager des modifications profondes des politiques de santé publique, que ce soit à l’échelle des individus ou des populations. Elle permettrait ainsi d’avoir une démarche proactive par rapport aux enjeux de santé, de telle sorte que les interventions puissent être situées au plus tôt, voire en amont de l’apparition de maladies. Il convient toutefois de souligner que cette évolution est encore en devenir et que la complexité de la médecine appelle non seulement à une prudence a priori dans l’utilisation de l’IA et à un questionnement éthique.

Les dispositifs médicaux connectés

Les dispositifs médicaux connectés, également appelés dispositifs médicaux numériques, sont des équipements médicaux qui intègrent des technologies de communication et de capteurs pour collecter, surveiller et transmettre des données sur la santé d'un individu. Ils peuvent prendre diverses formes, notamment des montres intelligentes, des tensiomètres connectés, des glucomètres, des applications mobiles de suivi de la santé, etc. Concrètement, il s’agit de montres connectées, d’un holter cardiaque, d’applications sur smartphone, etc.

Ils permettent de surveiller à distance l’état de santé d’une personne en collectant diverses données telles que la fréquence cardiaque, la glycémie, la pression artérielle, ou l'activité physique. Toutes ces données sont transmises aux professionnels de santé qui pourront les analyser afin d’ajuster le suivi de la personne en général, d’améliorer l’accompagnement de diverses maladies, notamment lorsqu’elles sont chroniques, et de déployer plus largement une démarche de prévention. Ils constituent enfin un élément majeur dans la montée en puissance de la télémédecine.

Il est important de noter que les dispositifs médicaux font l’objet d’une évaluation spécifique qui est encore appelée à évoluer. C’est l'Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des Produits de Santé (ANSM) qui règlemente et autorise l’utilisation de ces outils. Elle s’assure notamment que l’emploi est respectueux de divers critères de qualité et de sécurité, et plus particulièrement de cybersécurité.

La téléassistance, télémédecine et télésoin

Par ces trois termes, on désigne l’ensemble des services, actes ou interventions qui sont menés par des professionnels du médico-social via les technologies de l’information et de la communication.

La téléassistance

La téléassistance regroupe l’ensemble des services destinés aux personnes en situation de dépendance afin de leur permettre de garder un maximum d’autonomie, et rester autant que possible à leur domicile. Elle implique des dispositifs de surveillance (alarmes portatives, des capteurs de mouvement, des caméras, etc.) et des alertes en cas de situation d'urgence.

La télémédecine

La télémédecine englobe pour sa part les actes médicaux à distance, notamment la consultation médicale la formation médicale. Elle utilise des technologies de communication telles que la vidéoconférence, la télésurveillance, les applications mobiles et les échanges électroniques d'informations médicales. Elle permet également de mettre en œuvre la téléexpertise qui consiste à recueillir un avis spécialisé via ces technologies. Elle est aujourd’hui un facteur important d’amélioration de l’accès au soin et de lutte contre la désertification médicale.

Le télésoin

Le télésoin enfin est la déclinaison de télémédecine pour les professionnels paramédicaux. Ils peuvent ainsi proposer des interventions à destination ou exercer une téléexpertise relevant de leur champ de compétence.

Les défis de sécurité, de protection des données de santé et d’éthique d’usage du numérique

L’emploi du numérique engendre automatiquement l’émergence d’un certain de nombre de risques dont il faut précocement se prémunir individuellement et collectivement.

Sécurisation des pratiques

Le premier enjeu est lié à la sécurisation des pratiques. Cela concerne essentiellement la gestion des accès à l’écosystème numérique de l’établissement, les modalités de stockage et de partage des données, la lutte contre les piratages et autres attaques informatiques, et la gestion des consentements. En la matière, un certain nombre de recommandations de bonnes pratiques sont à la disposition des acteurs du médico-social comme celles qui sont à destination des libéraux ou plus largement à l’ensemble du secteur. Est également à souligner le respect des pratiques en matière de RGPD.

Politique de sécurité numérique

Le deuxième enjeu est de maintenir à niveau la politique de l’établissement en matière de sécurité numérique. En effet, les menaces évoluent perpétuellement et il est absolument indispensable que cette politique soit à la fois évolutive et réactive. Pour ce faire, il lui faudra progressivement intégrer les nouvelles technologies qui émergent, que ce soient les techniques d’intervention, l’internet des objets ou l’intelligence artificielle.

Éthique numérique

Le troisième enjeu est celui de l’éthique en matière de numérique en santé. Ainsi que le précise l’Agence du Numérique en Santé, elle s’appuie sur quatre piliers : l’autonomie, la justice, la bienfaisance et la non-malfaisance. À ceci s’ajoute le souci constant que doivent avoir à l’esprit l’ensemble des acteurs que l’ensemble des pratiques et outils ne viennent pas faire écran, sans mauvais jeu de mots, aux interactions humaines et à une personnalisation de l’accompagnement qui peut parfois être mise à mal par les processus standardisés que facilite beaucoup le numérique.

L’accompagnement des professionnels vers de nouvelles pratiques

L’ensemble de ces pratiques appelle à un nécessaire accompagnement au changement des professionnels du médico-social. Ce changement passe en tout premier lieu par une réelle appropriation des nouveaux outils et nouvelles pratiques, et il doit avant tout viser une potentialisation des parcours des personnes accompagnées.

Leviers d’accompagnement au changement

Plusieurs leviers sont à la disposition des établissements médico-sociaux pour réaliser ce changement. Le premier levier est celui de la formation, qui permettre de passer successivement de la découverte à la maîtrise des outils en passant par l’acceptation puis l’appropriation de ces derniers. C’est un processus qui se doit d’être progressif, allant des solutions numériques les plus simples aux plus complexes. Concomitamment à cette démarche, la mise en place d’un support technique dédié ainsi qu’une montée en compétence pour tous les professionnels en matière de sécurisation des données doit être mise en œuvre.

Impliquer les parties prenantes

Parallèlement, solliciter la participation et encourager l’implication des professionnels vers le virage numérique est essentiel. Cela passe d’abord par une association de ces derniers en termes de choix des solutions numériques qu’ils seront amenés à utiliser, le ménagement d’un certain degré de personnalisation des utilisations de sorte que chacun puisse adapter les usages à ses propres caractéristiques, et une prise en considération continue des retours d’expérience utilisateur pour continuer de faire évoluer les outils et pratiques numériques qui s’installent dans l’établissement. Une attention particulière devra toutefois être portée d’une part sur le coût en temps à la fois pour l’appropriation des outils et pratiques, mais aussi à leur usage au quotidien, et d’autre part sur le droit à la déconnexion, un droit qui doit être anticipé et organisé par l’employeur.

Partage d’expérience

Enfin, il convient d’apporter un soutien spécifique à une forme de "synergie numérique" entre l’ensemble des professionnels concernés, synergie qui passe par le partage d’expérience, la formation réciproque et la valorisation par la structure employeur de la plus-value apportée à la qualité des prestations ainsi déployées.

Le cadre donné par le programme ESMS Numérique

ESMS numérique est un programme d’action gouvernemental porté par la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie. Initié en 2019, lancé officiellement en 2021 et encadré par l’instruction N° DNS/CNSA/DGCS/2022/34 du 8 février 2022, il a pour principal objectif d’accélérer la transformation numérique que doivent nécessairement mettre en œuvre l’ensemble des établissements médico-sociaux en France, transformation essentiellement traduite par l’installation d’un Dossier Usager Informatisé (DUI). Pour cela, ce plan comporte trois grands axes d’intervention : accompagner financièrement les établissements, organiser un pilotage à l’échelle régionale, faire évoluer l’offre de logiciel dans le secteur.

Ce programme a notamment bénéficié des mesures issues du Ségur du Numérique en santé et bénéficie d’un dispositif dit Système Ouvert et Non Sélectif (SONS) qui s’appuie sur le cadre fixé par l’article 1111-24 du code de la Santé Publique qui permet à l’état de réaliser des achats au profit des établissements médico-sociaux.

Au final, ce sont 630 millions d’euros sur 5 ans qui sont investis, cela dans le cadre d’une politique globale de développement de la numérisation des parcours de santé d’un montant total est chiffré à 2 milliards d’euros.

Concrètement, cela signifie que tous les ESMS vont devoir s’équiper en DUI, mais également faire évoluer son dispositif numérique existant, pour favoriser la coordination des parcours de la personne. L’une des spécificités de ces DUI est qu’ils doivent impérativement être interopérables avec d’autres dispositifs, notamment ceux qui sont portés directement par le Ministère de la santé, à savoir notamment le Dossier Médical Partagé (DMP) et la messagerie sécurisée. Il appartient donc à chaque établissement d’entamer cette démarche et de solliciter la CNSA pour obtenir les financements adéquats.

Conclusion

Le programme ESMS Numérique est donc un accélérateur considérable de la transformation numérique du secteur médico-social. Il est une première étape de l’amélioration des pratiques en matière d’accompagnement des personnes à besoins particuliers. D’autres étapes sont à envisager pour aller encore plus loin dans la qualité de ces accompagnements et la mise en œuvre d’une approche pluriprofessionnelle coordonnée. C’est là un défi supplémentaire qui peut justement être relevé avec l’aide de Juggle, via son logiciel médico-social Method.

Crédit : Adobe Stock












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